A  B  C  D  E  F  G  H  I  J  K  L  M  N  O  P  Q  R  S  T  U  V  W  X  Y  Z
Classes  Systèmes cristallins  Chimie  Liste des minéraux
Vente de minéraux  Encyclopédie  Lexique

Les béryls rouges synthétiques russes

BORNET Rémi (2025)

Le béryl rouge naturel est une gemme d’une extrême rareté, trouvée principalement dans les montagnes Wah Wah de l’Utah, aux États-Unis. En raison de sa rareté et de son prix élevé, des scientifiques ont cherché à en créer une version synthétique. L'Institut de Cristallographie de Moscou, en collaboration avec la société Emcom Ltd., a ainsi développé un procédé de fabrication de béryls rouges synthétiques par croissance hydrothermale. Cet article explore la production, les propriétés et les techniques permettant d’identifier ces cristaux synthétiques.

Béryl rouge sur rhyolite de Violet claims, Beaver County, Utah, USA
Béryl rouge naturel de Violet Claims, Beaver County, Utah, USA © Rémi Bornet
Béryl rouge de 2,3 cm de Violet Claims, Beaver County, Utah, USA © Heritage Auctions
Béryl rouge naturel de Violet Claims, Beaver County, Utah, USA © Heritage Auctions
Béryl rouge de 2,6 cm sur rhyolite de Violet Claims, Beaver County, Utah, USA © Jeff Scovil
Béryl rouge naturel de Violet Claims, Beaver County, Utah, USA © Jeff Scovil
Béryl rouge de 3,7 cm de Violet Claims, Beaver County, Utah, USA © Rob Lavinsky
Béryl rouge naturel de Violet Claims, Beaver County, Utah, USA © Rob Lavinsky

Origine et production des béryls rouges synthétiques

Alors que la synthèse des émeraudes est maîtrisée depuis plusieurs décennies, celle des béryls d’autres couleurs est plus récente. La production de béryls rouges synthétiques a débuté en Russie au milieu des années 1990, motivée par l’attrait commercial de cette gemme rare. Bien que leur production ait ralenti en raison d’une demande limitée, ces pierres continuent de circuler sur le marché.

Méthode de croissance hydrothermale

Béryl rouge synthétique russe de 3,4 cm © Rémi Bornet

Les béryls rouges synthétiques sont fabriqués selon un procédé hydrothermal nécessitant des températures supérieures à 600°C et des pressions dépassant 2000 bars maintenues sur des intervalles de temps importants dans des réceptacles appelés "autoclaves". La croissance cristalline s’effectue à partir d’une fine plaque de béryl synthétique ou d’émeraude synthétique servant de support et maintenu par un fil de cuivre. Pour obtenir leur teinte caractéristique, les fabricants introduisent du cobalt et du manganèse dans l'autoclave, accompagnés de fer et d’éléments alcalins.

Les cristaux obtenus possèdent une forme tabulaire à prismatique hexagonale et sont le plus souvent allongés parallèlement à la plaque de départ. Ils présentent des caractéristiques morphologiques bien définies, avec des prismes et des dipyramides, ainsi que des motifs de croissance internes en chevron et des structures légèrement ondulées.

Photo : Béryl rouge synthétique russe de 3,4 cm © Rémi Bornet

Caractéristiques gemmologiques des béryls rouges synthétiques

Les béryls rouges synthétiques possèdent des propriétés optiques et physiques qui les distinguent de leurs homologues naturels. Leur indice de réfraction varie généralement entre 1,569 et 1,580 avec une biréfringence comprise entre 0,006 et 0,008. Ces valeurs, bien qu’assez proches de celles du béryl naturel, sont légèrement plus faibles, notamment en raison de la composition chimique des synthétiques qui sont appauvris en éléments alcalins.

Leur densité oscille entre 2,67 et 2,70, une valeur similaire à celle du béryl naturel. Leur pléochroïsme est marqué et présente deux teintes distinctes : une teinte rouge-pourpre lorsqu’on l’observe parallèlement à l’axe cristallin et une teinte rouge-orange à brun-orange lorsqu’on l’observe perpendiculairement à cet axe. Sous lumière ultraviolette, les béryls rouges synthétiques ne présentent aucune fluorescence, que ce soit sous UV court ou long.

Quant à leur répartition de couleur, elle est généralement uniforme dans les pierres taillées, bien que certaines zones brunâtres puissent être observées dans les cristaux bruts. Contrairement aux béryls rouges naturels, qui présentent souvent des motifs zonés en sablier, les béryls synthétiques montrent plutôt des zonations internes en chevron ou des motifs de croissance ondulés.

Habitus des cristaux de béryl naturel, caractérisée par six faces prismatiques {1-100} et deux faces pinacoïdales {0001} et leurs secteurs de croissance d'après Rakovan & al. (2006)


Habitus des cristaux de béryl naturel, caractérisée par six faces prismatiques {1-100} et deux faces pinacoïdales {0001} et leurs secteurs de croissance d'après Rakovan & al. (2006)

Identification des béryls rouges synthétiques

L’identification des béryls rouges synthétiques repose sur l’examen de leurs inclusions, de leur spectre d’absorption ainsi que de leur composition chimique.

L’analyse des inclusions permet d’observer des caractéristiques distinctives des pierres synthétiques. Les béryls rouges synthétiques présentent souvent une structure de croissance en chevron, avec des bandes de zonation légèrement ondulées. Ce type de zonation est totalement absent des béryls rouges naturels. Certaines fractures partiellement cicatrisées sont également visibles, contenant de petites inclusions liquides ou gazeuses. Par ailleurs, on peut observer des inclusions solides rares, notamment des plaquettes d’hématite ou des inclusions triangulaires dont la nature exacte demeure incertaine.

L’analyse spectroscopique révèle également des différences marquées entre les béryls synthétiques et naturels. Dans le spectre visible, les béryls synthétiques présentent plusieurs bandes d’absorption bien nettes situées entre 530 et 590 nm, causées par la présence de cobalt. En revanche, le béryl rouge naturel affiche une large bande d’absorption centrée autour de 560 nm, due à la présence de manganèse trivalent. Cette différence spectrale permet une identification fiable du matériau synthétique.

L’examen en spectroscopie infrarouge constitue un autre critère d’identification. Les béryls rouges synthétiques montrent une forte absorption dans la région comprise entre 4200 et 3200 cm-1, caractéristique de la présence d’eau dans leur structure. À l’inverse, les béryls rouges naturels de l’Utah contiennent très peu d’eau et n’affichent pas cette absorption dans cette zone du spectre.

Enfin, l’analyse chimique, réalisée par fluorescence X (EDXRF) ou microsonde électronique, permet d’identifier la composition élémentaire des pierres. Les béryls synthétiques contiennent systématiquement du cobalt et du nickel, deux éléments qui sont totalement absents des béryls naturels. En revanche, les béryls naturels se distinguent par la présence de césium, d’étain et de zinc, des éléments qui ne sont pas détectés dans leurs homologues synthétiques.

Cristal de béryl rouge synthétique de 81,2 ct © Rémi Bornet
Cristal de béryl rouge synthétique de 81,2 ct © Rémi Bornet
Béryl rouge synthétique de 2,15 ct © Rémi Bornet
Béryl rouge synthétique de 2,15 ct © Rémi Bornet
Béryl rouge synthétique de 2,61 ct © Rémi Bornet
Béryl rouge synthétique de 2,61 ct © Rémi Bornet
Chevrons de croissance typiques des béryls synthétiques hydrothermaux © James Shigley
Chevrons de croissance typiques des béryls synthétiques hydrothermaux © James Shigley

Conclusion

Les béryls rouges synthétiques fabriqués en Russie constituent une alternative attrayante aux béryls rouges naturels, qui sont à la fois rares et coûteux. Grâce à leur production par croissance hydrothermale, ces pierres possèdent des propriétés optiques et physiques similaires à celles des béryls naturels, bien qu'elles restent facilement identifiables par des gemmologues avertis. L’analyse des inclusions, l’examen des spectres d’absorption et l’analyse chimique permettent d’authentifier ces matériaux et d’éviter toute confusion sur le marché de la gemmologie.

Références :

BARLOW J.F. (1979) Red beryl of the Wah Wah's. Lapidary Journal, Vol. 32, No. 12, pp. 2540-2570.
HILLEBRAND W.F. (1905) Red beryl from Utah. American journal of Science, 4th series, Vol. 19, pp. 330-331.
RAKOVAN J., KITAMURA M., TUMADA O. (2006). Sakura ishi (cherry blossom stones): Mica pseudomorphs of complex cordierite-indialite intergrowths from Kameoka, Kyoto Prefecture, Japan. Rocks and Minerals, Vol. 81, No. 4, pp. 284–292

SHIGLEY, J. E., & FOORD, E. E. (1985). Gem-quality red beryl from the Wah Wah Mountains, Utah. Gems & Gemology, Winter 1984, 208-220
SHIGLEY, J. E., THOMPSON, T. J., & KEITH, J. D. (2003). Red beryl from Utah: A review and update. Gems & Gemology, Winter 2003, 302-313.
SHIGLEY, J. E., et al. (2001). Hydrothermal Synthetic Red Beryl from the Institute of Crystallography, Moscow. Gems & Gemology, vol. 37, no. 1, 2001, pp. 42–55.

ReCaptcha

Ce service de protection de Google est utilisé pour sécuriser les formulaires Web de notre site Web et nécessaire si vous souhaitez nous contacter. En l'activant, vous acceptez les règles de confidentialité de Google: https://policies.google.com/privacy

Google Analytics

Google Analytics est un service utilisé sur notre site Web qui permet de suivre, de signaler le trafic et de mesurer la manière dont les utilisateurs interagissent avec le contenu de notre site Web afin de l’améliorer et de fournir de meilleurs services.

Facebook

Notre site Web vous permet d’aimer ou de partager son contenu sur le réseau social Facebook. En l'utilisant, vous acceptez les règles de confidentialité de Facebook: https://www.facebook.com/policy/cookies/

YouTube

Les vidéos intégrées fournies par YouTube sont utilisées sur notre site Web. En acceptant de les regarder, vous acceptez les règles de confidentialité de Google: https://policies.google.com/privacy

Twitter

Les tweets intégrés et les services de partage de Twitter sont utilisés sur notre site Web. En activant et utilisant ceux-ci, vous acceptez la politique de confidentialité de Twitter: https://help.twitter.com/fr/rules-and-policies/twitter-cookies

PInterest

Notre site Web vous permet de partager son contenu sur le réseau social PInterest. En l'utilisant, vous acceptez les règles de confidentialité de PInterest: https://policy.pinterest.com/fr/privacy-policy/